Le dépistage précoce d'une pression intra-oculaire
(PIO) élevée est d'autant plus essentiel que la régression
du nombre d'axones constituant le nerf optique est continue tout au long
de la vie.
A la naissance, chacun des deux nerfs optiques est constitué d'environ
un million de fibres issues des cellules ganglionnaires. Ce chiffre
décroît de façon physiologique avec une perte moyenne
de cinq mille fibres par an. Le capital est donc de deux cents ans
environ.
Le glaucome chronique
est une maladie caractérisée par une augmentation de la perte
progressive de ces fibres visuelles. La maladie diagnostiquée, le
traitement aura pour objectif de diminuer cette perte pathologique des fibres,
mais la perte physiologique se poursuivra. Si le diagnostic est tardif,
même avec un traitement efficace, le patient risque de ne plus avoir
un capital en fibres optiques suffisant pour conserver une vision satisfaisante
à un âge avancé.
Le
dépistage précoce du glaucome est capital
Le dépistage
précoce du glaucome chez des sujets jeunes ayant une longue
espérance de vie est donc capital. Un diagnostic d'excavation papillaire
avec un rapport cup/disc (C/D) à 0,9 est une situation dramatique
pour l'avenir, car vingt ans après ce diagnostic, même avec
un bon contrôle de la PIO, le patient sera frappé de
cécité par la progression de la perte physiologique des fibres
de ses nerfs optiques.
Le diagnostic de glaucome est un problème posé à
l'échelle d'une population. Il utilise des tests dont la sensibilité
et la spécificité varient en fonction du nombre de vrais positifs,
de faux positifs, de vrais négatifs et de faux négatifs. La
sensibilité permet d'apprécier la capacité d'un test
à diagnostiquer tous les patients malades d'une population, alors
que la spécificité est la mesure de la fiabilité de
la présence de la maladie chez les patients présentant des
résultats anormaux à ces tests.
La PIO n'échappe pas à cette règle : une PIO
supérieure à 21mm Hg est un test diagnostique dont la
sensibilité est de 50 % ; la moitié des glaucomes
n'est pas diagnostiquée par un tel test. Il faut, pour augmenter la
sensibilité, ajouter d'autres critères comme les facteurs
génétiques, les variations nycthémérales
éventuelles, une dispersion pigmentaire, des résultats de
pachymétrie ou un angle étroit en gonioscopie, etc.
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Les
nouveaux tests développés actuellement, comme le Heidelberg
retina tomograph (HRT), le GDX ou l'étude du champ visuel par
frequency doubling technology (FDT), ont pour objectif d'améliorer
la sensibilité et la spécificité du diagnostic du
glaucome.
L'épaisseur
de la cornée est un critère
important
L'épaisseur
de la cornée est un critère important ; ainsi la chirurgie
réfractive va masquer des tensions oculaires élevées
par amincissement chirurgical de la cornée. Le tonomètre de
Goldman a été calibré pour une épaisseur
cornéenne moyenne de 520 microns. Les chiffres de PIO peuvent être
faussement majorés par une cornée plus épaisse, une
quantité trop importante de fluorescéine, un astigmatisme,
un fort blépharospasme ou une pression veineuse centrale augmentée
par une manoeuvre de Valsalva. A l'inverse, la PIO peut être faussement
minorée par une cornée mince, une mesure sans fluorescéine,
un dème du stroma cornéen ou un astigmatisme. En cas
de glaucome à pression normale, la cornée est statistiquement
plus fine, la normale étant de 540 à 550 microns. Inversement
l'épaisseur cornéenne des patients à PIO élevée
est plus importante.
L'Ocular hypertension treatment study (OHTS)* a permis de suivre,
pendant six ans, 1 636 patients présentant des chiffres pressionnels
élevés avec une papille et un champ visuel normal lors de leur
inclusion. Pour des cornées de moins de 550 microns et une pression
supérieure à 25 mm Hg, 36 % des patients ont développé
un glaucome contre seulement 2 % chez des patients avec des pachymétries
supérieures à 580 microns et des PIO inférieures à
23 mm Hg. Il est à noter qu'il n'a pas été mis en
évidence de relation linéaire entre l'amincissement de cornée
lors de la chirurgie réfractive et la baisse du chiffre de la PIO
mesurée. Selon les études, ces chiffres varient de 0,19 à
0,70 mm Hg pour 10 microns de stroma ablaté.
Pas
de différence significative, quel que soit le mode de mesure de la
pression intra-oculaire
Une étude,
effectuée à la fondation-hôpital de Saint Joseph, a
cherché à évaluer la fiabilité des mesures de
PIO selon les techniques utilisées : tonomètre de Goldman,
tonomètre à air pulsé et pneumotonomètre
(POBF).
Les résultats des trois systèmes de mesure n'ont pas mis en
évidence de différence significative. Le POBF enregistre les
variations de PIO liées à la systole et la diastole des
artères centrales de la rétine.
La pachymétrie est donc un paramètre important à prendre
en compte quelque soit la technique de recueil de la PIO, et les résultats
des abaques établissant une relation entre la PIO et la pachymétrie
doivent être interprétés avec
prudence.
*THE
OCULAR HYPERTENSION TREATMENT STUDY |