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Lunettes 3/4 © Mawas LJ, et al.

Rôle des troubles de l’accommodation dans la genèse du strabisme précoce et leurs traitements.

Accommodation anomalies in the beginning of strabismus and their treatment.

Mawas L.-J., Franceschetti A., Diraison  M.-C., Vincey L., Urvoy M.

 
Résumé

Contexte De la naissance à trois ans, chez un enfant normal, la longueur axiale moyenne de l’œil augmente de 17 mm à 23 mm. La puissance du cristallin diminue de 40 à 20 dioptries. La distance de l’objet regardé passe de 5 à 20 cm. L’écart inter-pupillaire grandit de 5 à 6 cm. Il en résultera de grandes variations de l’accommodation et de la convergence ainsi que des  troubles tels que le strabisme et l’amblyopie.

Sujets et méthodes Etude de neuf bébés examinés dès l’apparition du strabisme a) intermittent b) constant. Pose de lunettes en plastique souple type  Como Baby portées  jour et nuit dès que le défaut est constant. Correction de l'accommodation non réfractive par des verres avec une addition progressive de +5 dioptries en sus de l’amétropie (ou mieux encore les verres 3/4 de F. Leplat).

Résultats Avec cette méthode, une disparition de la déviation est notée chez sept bébés.

Discussion Pourquoi traiter si  précocement ?

Conclusion Les troubles de l’accommodation commencent très tôt, aussi doivent-ils être pris en charge très tôt.

Réferences

Summary

Purpose From birth to the age of three, the axial length of a baby increases from 17 to 23 millimeters. The power of the lens changes from 40 diopters to 20. The distance of fixation of an object evolutes from 5 centimeters to 20. The interpupillary distance increases from 5 to 6 centimeters. Thus accommodation and convergence undergo major variations, which can be source of problems like strabismus.

Material and method Nine babies were examinated as soon as the first sign of squint appeared, either intermittent a) or constant b). Soft plastic frames Como Baby  type of Paliaga with or without lenses were prescribed to be worn constantly if possible. An addition to the correction of non  refractive accommodation of + three to +five  put progressively  in excess of the ametropia (3/4 lenses of F.Leplat).

Results Seven of nine babies have had their deviation disappear with this method.

Discussion Why is it important to give frames without lenses to babies ? Because a baby has to accept frames which are unusual to him. And why treat so early ? To avoid amblyopia.

Conclusion Accommodation problems start very early in life; they should be treated as soon as they appear.

References

Mots clés strabisme précoce, accommodation, convergence, lunettes sans verres, lunettes Como Baby, verres trois-quarts de F. Leplat. Key Words early squint, accommodation, convergence, frame without lenses, soft plastic frames, 3/4 lenses of F. Leplat.

RETOUR INTRODUCTION

Le strabisme convergent précoce apparaît entre deux mois et six mois (photo 1). E. Helveston a étudié 1219 nouveaux-nés (1). Il a démontré qu’après trois jours d’incoordination oculaire chez la moitié des nouveaux nés et d’orthophorie chez les autres, tout ce petit monde se rejoint pour une période plus ou moins longue d’orthophorie. Ce n’est qu’après cette période, qui dure de quelques semaines à six mois, qu’apparaît, d’abord intermittent puis constant, le strabisme convergent précoce, donc non congénital. C'est important sur le plan thérapeutique, car pendant quelques semaines les bébés ont eu les yeux droits et les « aires corticales de la fusion » ont été stimulées. Comme en  biologie, les voies de transmission, une fois ouvertes, peuvent  l’être à nouveau si un traitement adéquat est institué précocement.

Le strabisme convergent précoce apparaît entre deux mois et six mois

A trois mois, pour R. Aslin et M. Maille (2,3), et vers six mois, pour G. Tondel (4), un bébé accommoderait comme un jeune adulte (fig.2). Le globe oculaire se transforme bien plus rapidement que le reste de son corps comme le démontre l’étude échographique d’A. Franceschetti et de J. Luyckx (5). De la naissance à trois ans, la longueur axiale passe en moyenne de 17,5 à 23 mm. La puissance du cristallin diminue de 42,7 dioptries à 20 dioptries L’écart pupillaire passe de 5 à 6cm. La distance d’intérêt de l’objet regardé passe de 5 à 20 cm ; c'est un point essentiel. Vers l’âge de deux mois la longueur de l’avant-bras replié en flexion sur le bras est de 5 cm (6,7). Enfin la réfraction oculaire est en moyenne de + 2,5 dioptries. Un bébé qui fixe à 5 cm, longueur de son avant bras replié, développe, s’il veut voir net l’objet de son intérêt, 20 dioptries d’accommodation et 100 dioptries de convergence (photo 2). A 3 cm quand le bébé porte un jouet à sa bouche, il développe environ 33 dioptries d’accommodation et 165 dioptries de convergence.
Ainsi, de la naissance à trois ans, ces bouleversements rapides et nombreux de l'ensemble du corps font que l’accommodation et la convergence traversent une zone de « turbulences ».  Chez certains enfants, prédisposés par l’hérédité ou ayant une capacité d’attention importante, ou encore affaiblis par une maladie infantile, peut survenir un spasme en convergence. S’il n’est pas traité, ce spasme peut évoluer vers une contracture (8). E. Javal et J. Sichel (9,10) conseillaient déjà au XIXe siècle l’utilisation de gros jouets, sans détails trop fins, pour les bébés. Supposons comme Javal (9,10), Costenbader (11) et R.Navarra (12) qu’une parésie de l’accommodation survienne ; alors s’ajoute la « surconvergence » d’A. Franceschetti.

RETOUR SUJETS ET METHODES

Notre étude a concerné les dossiers de neuf bébés examinés dès l’apparition du strabisme intermittent ou constant. Dès la première consultation d’un bébé présentant un strabisme convergent, nous demandons aux parents la date d’apparition de l’anomalie. La réponse habituelle est : il louche depuis sa naissance. Nous demandons alors une photo datant des quinze premiers jours de l’enfant ou mieux encore son album de photos. Il nous permet le plus souvent de constater les reflets bien centrés des premières semaines, puis l’apparition du vrai strabisme, d’abord intermittent puis constant. C’est au cours de la période qui va de quinze jours à six mois qu’est apparu le vrai strabisme. Or, dans le meilleur des cas, l’enfant est présenté à l'ophtalmologiste deux à quatre mois après l’installation de la maladie. En effet, « tout le monde  prétend que les yeux des bébés vont dans tous les sens  … Et que cela s’arrange tout seul » (sic).
L’examen à l’écran de la motilité oculaire étant pratiqué à 15 cm, et même à 25 cm, peut laisser ignorer la présence d’un strabisme intermittent au début.
Nous avons souvent constaté un spasme en convergence en approchant notre visage souriant à 5 cm de celui du bébé (photo 3); il est la manifestation d’un strabisme convergent intermittent (13) .
Nous poursuivons l’examen de la motilité de l’enfant en mobilisant notre visage dans toutes les directions du regard mais en essayant de rester toujours proche de lui (photo 4). Après avoir éliminé toute cause organique de malvision et évalué une éventuelle amétropie uni ou bilatérale par skiascopie sous tropicamide, nous prescrivons le « traitement » mis en œuvre avec la pose de lunettes en plastique souple type Como Baby de Paliaga, avec ou sans verres (photos 5 et 6). L’idée de la correction précoce par lunettes souples est de S. Réthy (14).

Le traitement des strabismes intermittents commence par le port de lunettes sans verres

Dans le cas du strabisme intermittent, nous débutons par le port de lunettes sans verres lors des bons moments de la vie du bébé (repas, présence des parents) ; l’enfant, vers deux mois, s’habituera aux lunettes (photo 7) comme il s’habitue à porter des moufles ou des chaussons. Puis nous observons attentivement l’enfant. Le strabisme, on le sait, peut disparaître spontanément ou, au contraire, devenir constant. S’il est devenu constant, on place des verres correcteurs et le port de lunettes devra être constant voire même pendant le sommeil (photos 8 et 9), ce qui permet à l’enfant d’avoir ses lunettes dès son réveil (les bébés dorment une grande partie de la journée). En plus de la correction de l’amétropie, nous corrigeons progressivement l’accommodation non réfractive par une addition progressive et modulable de cinq dioptries environ suivant l’angle du strabisme. Nous utilisons ainsi les verres tri-adhérents ou des verres trois-quart (photos 10 et 11). Les verres tri-adhérents de F.Leplat (15) permettent, pour un coût acceptable, de réduire la déviation tout en pénalisant l’œil dominant, évitant ainsi l’amblyopie de l’œil dominé. Mieux encore, le nouveau verre  trois-quarts de F.Leplat (15) facilite, en préservant la vision de loin, l’adaptation au handicap. La surveillance est indispensable, deux fois par jour, pendant trois jours au moins par toute l’équipe (ophtalmologiste, orthoptiste, opticien), tout en réalisant des exercices d’abduction, aussi bien au cabinet de l’orthoptiste qu’à domicile, avec l’aide des parents.

RETOUR RESULTATS

De cette manière, le strabisme doit avoir diminué voire même disparu en une semaine à  condition que les verres soient constamment portés, et que l’enfant ne joue qu’avec de gros jouets sans petits détails visibles. Grâce à cette méthode, nous avons noté la disparition de la déviation chez sept des neuf bébés. Les deux autres bébés ont du être opérés à l’âge de 18 mois et ils bénéficient d’une fusion périphérique.

RETOUR DISCUSSION

Deux questions peuvent être posées : Pourquoi traiter aussi précocement  ? Pourquoi des lunettes sans verres ?

Traiter au départ de la maladie

Le strabisme est la seule maladie qui ne se soigne pas dès son apparition. Il se développe avec l’apparition de l’intérêt et de l’attention du bébé pour "ses mains et les jouets de petite taille, le sourire des parents" (A. Schlossman).

Mieux accepter le port de lunettes

Le port de lunettes sans verres permet d'habituer le bébé à accepter les lunettes comme il accepte ses vêtements. Il évite également de transformer, par le port de verres correcteurs, une ésotropie intermittente en une ésotropie constante. C’est le besoin de trop accommoder qui entraîne une trop grande convergence et vice-versa. On ne saura trop insister sur le fait que le traitement du strabisme intermittent devenu constant est un traitement d’urgence.

RETOUR CONCLUSION 

Les troubles de l’accommodation et de la convergence commencent très tôt mais ne sont pas congénitaux stricto sensu. Ces troubles doivent être traités médicalement dès leur apparition, ce qui est difficile en raison des idées reçues. Ils peuvent disparaître ainsi que le strabisme avec ses conséquences : l’amblyopie et/ou la désunion binoculaire.

RETOUR BIBLIOGRAPHIE
  1. Helveston  EM. Esotropia in the First Year of Life. Pediatric Ophthalmology and Strabismus. Ophthalmology. Raven Press 1986.

  2. Aslin RN, Shea SL, Metz HS. Use of the Canon R-1 autorefractor to measure refractive errors and accommodative responses in infants. Clin Vision Sci 1990;5:61-70.

  3. Maille M. Anomalies de la réfraction, de l’accommodation et de la convergence. Traité d’Optique physiologique et clinique. C. Corbé, J.-P. Menu, G. Chaine. Doin 1993:111.

  4. Tondel G, Horner DG, Bradley A, Wilson G, Candy TR. Infant accommodation dynamics measured by eccentric videorefraction. Invest Ophthalmol Vis Sci 42(4) :S.385

  5. Luyckx J . Mesures des composantes optiques de l’œil du nouveau–né par échographie ultrasonique . Arch Opht 1966;26:159-170.

  6. Harmon D. Communication personnelle 1985.

  7. Carrot C. Communication personnelle 1990.

  8. Weiss JB, Ménager P. Spasme et contracture spasmodique chez le strabisme convergent . Bull Soc Ophtalmol Fr 1967;80:548-558.

  9. Javal E. Manuel du Strabisme, Masson 1896:1.

  10. Sichel J. cité par E.Javal. Manuel du Strabisme. Masson 1896.

  11. Helveston EM. 19th annual Frank Costenbader Lecture – The origins of Congenital Esotropia. J Pediatr Ophthalmol Strabismus 1993;30:215-32.

  12. Navarra R. Les troubles accommodatifs comme facteurs déclenchant certaines ésotropies infantiles et leur traitement. Communication personnelle 1982.

  13. Schlossman A. Sorsby Ophthalmology Vol 3 1983.

  14. Rethy S. Intermittent Squint during the First Year of Life-Primarily for near distance developing anomaly as cause of stabilized-functional resistance to conservative treatment. Fortschr Ophtalmol 1984;81:668-672.

  15. Leplat F. Les verres bi -adhérents. Le verre trois quarts.Vision et Strabisme (à paraître).

Mai 2001


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